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écrits du sous-sol 地階から
27 mai 2020

Dedekind et l'arithmétique des non-nombres

Disons-le, Dedekind était un savant allemand bien sympathique, contrairement à Cantor, indélicat, à Gödel, irréductible certes, mais plus ou moins fou: sans qu'on puisse le comparer à Russell, Dedekind refusa de prêter allégeance au Kaiser en 1914.

Bref, sa pensée mathématique n'était pas un délire, encore moins une imposture... Et on ne saurait la réduire à la définition du nombre rationnel comme coupure!

 

Dedekind, d'une part, dépouille le nombre naturel de sa chair et le réduit à son fantôme logique. Un objet qui n'est pas un nombre en est un, ou joue son rôle. Le nombre est en soi ordre logique, émanation de l'esprit humain.

D'autre part il s'attaque au pseudo-nombre idéal construit pour les besoins de la cause, à savoir décomposer les nombres entiers algébriques sur le modèle des nombres rationnels. Ainsi l'on étend aux nombres algébriques la notion de nombre premier, mais par un artifice qui évoque l'invention des nombres imaginaires, ou plus simplement des nombres négatifs.

Selon Dedekind, le nombre idéal n'est pas un vrai nombre, mais un ensemble de nombres: il ne comprend plus par sa propre notion d'idéal un facteur p, existant ou fictif, comme le faisait Ernst Eduard Kummer, mais l'ensemble des nombres divisibles, effectivement ou fictivement, par ce facteur p. 

On peut cependant le traiter exactement comme un nombre, au point de vue des opérations arithmétiques, et tout singulièrement de la divisibilité, si importante aux yeux des mathématiciens du XIXeme siècle.

A noter que Dedekind est étranger au structuralisme, sinon par une illusion rétrospective du vrai.

Reste à savoir si tout nombre ne peut pas être considéré comme un ensemble, et un ordre. Ne serait pas nombre ce qui n'est pas ensemble, ou bien étranger à l'ordre...

Ainsi Dedekind entend se passer des calculs, leur substituer des raisonnements conceptuels moins fastidieux, et peuple pourtant notre monde de nombres, ou pseudo-nombres, nouveaux, des espèces d'oiseaux inconnues, et qui pourtant ont presque les moeurs opératoires des espèces mieux connues, nos chers nombres naturels, avec leur bouille familière, qui recouvre leurs profonds mystères ésotériques.

Chair et ombre des nombres...

"Car de tout temps, dit le musicien, Orphée, mon coeur amoureux fut l'abri le piège et la prison de ces grands oiseaux si pleins de notre ombre, les nombres."

Dedekind, l'arithméticien-poète, écrit qu'il est toujours beau de voir le monde abstrait de l'algèbre s'élever soudain, par magie, à la vie des nombres. Alors, on voudrait rester toujours dans la lumière de ce soleil, et non descendre dans l'Hadès, car avec l'habitude l'obscurité nocturne des nombres complexes est devenue lumière solaire...

Cet Hadès, peuplé de fantômes, c'est l'algèbre formelle, aveugle, par opposition à l'arithmétique, vie et soleil.

 En d'autres termes, le nombre, ou pseudo-nombre, est contenu, sens, sémantique, par opposition aux calculs aveugles, nocturnes, de l'algèbre. Alain parlait de l'algèbre comme d'un tunnel, par opposition au paysage géométrique, ou ici arithmétique !

 

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  • Confiné dans mon sous-sol depuis mai 2014, j'ai une pensée pour tous les novices du confinement! Mais comme j'ai dit souvent, tout le malheur des hommes vient d'une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer en repos dans une chambre...
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