Du sage
Le sage stoïcien, qui croyait en la providence, considérait que les maux infligés par ses ennemis, les méchants, étaient autant d'épreuves pour mieux exhaler sa beauté morale, pour mieux se détacher de ce qui ne dépend pas de lui, pour mieux devenir lui-même, à savoir la raison, à savoir le devoir.
Il avait pitié de ses ennemis, les fous qui s'imaginaient pouvoir l'atteindre de leurs flèches émoussées. Cette pitié, comme de bien entendu, rendait ces imbéciles, ces ignorants, plus enragés encore contre lui. On connaît le succès de Hara Kiri, si bête et si méchant.
On comprend mieux dans ces conditions pourquoi le sage stoïcien était réputé plus rare que le phénix, qui certes est invulnérable, mais est impossible, et par conséquent n'existe pas.
Soit. Alors disons que pour celui qui n'a peur de rien, qui ne manque de rien, sinon d'occasions de se réjouir, les entreprises absurdes de ses ennemis sont autant de plaisantes et instructives petites comédies. Mais cela lui donne du travail: il faut encore qu'il transcrive en mots, sur le papier, les clowneries aussi méchantes qu'ineptes de tous ces braillards, de tous ces fous! Trouvera-t-il un éditeur?