les cartes d'autrefois fort biseautées
Les cartes d'autrefois étaient fort biseautées
L'on était joué avant de distribuer,
Et mon âme, mon âme, s'étant égarée,
Pauvre cavale, tu ne l'avais retrouvée!
Je te nomme, et tu refuses tous les noms,
Ainsi que ce potier qui dans son four un jour
m'avait cuit, et recuit, de colère et d'envie!
O Liberté, naguère je ne voulus boire que ton eau
Qu'eau jaillie de ta jarre, et tout lait me rebutait
S'il ne coulait de ton sein!
Le tout premier homme, ou bien le second (en fut-il un autre?), frère en tout cas de tout homme, distribuait les cartes,
Et Liberté, toi, ô mon ange, tu faisais le guet, et les levées.
Je t'attendais, Liberté, tu avais oublié que c'était à moi de jouer
A moi de réparer toutes tes jarres,
Toutes, sauf deux, toutes, sauf trois, cuites au feu, et puis brisées.
Tu étais si loin, Liberté,
Et je ne savais plus si c'était pour m'aimer,
Ah que tu sois au plus loin, afin que je te rejoigne!
Il est de plus doux voyage, mais point de plus déchirant !
Ô liberté! Pourquoi m'avoir tant dit?
Pourquoi m'avoir tout dit?
Je ne suis ni un juge ni un maton,
Et mon nom est le silence
Hélas ce mot brûlant me tue au moment où il nomme!
C'est que je ne suis que l'homme de naguère!
En fut-il un autre, que l'homme que je suis,
Le second dit-on mais en fut-il un premier?
Hors peut-être Vendredi,
Vendredi, le dernier des hommes
En ton île empuantie
Tes pets sentent le souffre, et tes pieds sont fourchus
Mon frère Vendredi!
On dit que tu es roi et l'herbe, sur la colline, confiait aux pierres de la digue ton secret
Ah, Roi Marc'h, que rien ne consolera, pourquoi mentent tous les Druides?
Parce que je suis le silence, le mot bruyant qui me nomme et m'etreint
En effleurant mon cœur l'éteint, et le feu du potier !