du général et de l'individuel
Il n'y a de science que du général... Pourtant au sein de ce général naît l'individuel. Les cas les mieux connus sont ceux où l'individuel est intelligible, ainsi la phrase, le discours, fruit infini de règles et d'éléments en nombre fini. On a raison d'y lire un jeu, et les situations innombrables du jeu d'échecs constituent le second exemple classique.
Et comment notre intelligence peut-elle suivre le fil de cette singularité? Précisément parce qu'il y a un fil.
En histoire, en droit, plus généralement dans la vie, il faut pour comprendre retrancher une part importante de cet individuel. De l'infinité des mouvements qui animent l'acteur historique l'historien ne retiendra, ne pourra retenir, qu'un schéma qui simplifie.
Mais est-il si sûr que nous sommes animés par une infinité de mouvements intérieurs? N'est-ce pas se vanter? La réalité n'est-elle pas, en somme, c'est le cas de le dire, mais aussi dans le détail, plus simple? C'est du moins ce que suppose Dostoïevski, à propos de Fiodor, le père des frères Kamarazov, et aussi de tout homme, de nous aussi.
Il n'en reste pas moins qu'en art, et aussi dans l'histoire des mathématiques, nous sommes confrontés au défi de comprendre l'individuel pur, qui nous bouscule. C'est Pythagore jeté dans les flots des nombres irrationnels, irréductibles aux nombres entiers.
Chaque polygone, dès qu'il se voit défini, constitue un monde neuf, analogue à une planète, même dans le cadre de la géométrie classique - et parfois un monstre qui renouvelle ce cadre classique.