ciguë de la patience
Ciguë de la patience,
Venin bien lent, lumignon vénéneux, ainsi qu'un champignon, verse moi ton lent poison, goûteux comme le vin blanc, qu'on dit sang divin
Patience, tu es la nuit, une nuit née d'un marigot, une nuit qui me ressemble et dont je ne suis jamais sorti. Une nuit, chose étrange, qui fait bien du bruit, un tumulte en mille langues, et qui ne dit jamais rien. C'est que je suis trop dur de par l'écorce pour que m'insupporte ce bruit, pour que m'insupporte cette nuit, ce crépuscule couleur de viol, ce crépuscule pourpre. Bel étendard, c'est bien lourd péché, que de tout supporter sans révolte, parce que l'on est si fort, foin du mal, foin du bien, foin du plaisir, foin de la douleur! Entrez dedans la grange!
Je suis la souche couleur de bien des soirs; couleur de bien des nuits.
Et pourtant il fut un jour, ou peut-être n'était-ce pas tout à fait un jour, une aube, un crépuscule, qui sut jamais la différence? Est-elle entière, cette différence, comme le nombre franc, le mâle intègre et pair? Une aube, un crépuscule, et mon poing jaillit, ainsi qu'une fusée, frappa le museau de l'ogre, troua la muraille. J'ignorais seulement que cette prison vaste comme le monde, étroite comme mon coeur serré, n'avait d'autres murs que
mon étonnante patience.